Je suis tombé hier sur deux articles qui me semblent être en parfaite résonance. Le premier est de Gary Hamel, l'un des grands penseurs actuels du management.
Dans cet article intitulé Management's dirty little secrets il décortique une étude menée par le cabinet Towers Perrin sur le niveau d'engagement des employés dans les organisations. Elle a été menée sur 90000 personnes dans 18 pays et nous apporte un certains nombre d'éléments utiles à la compréhension des dynamiques qui traversent actuellement les entreprises :
- 21% des employés interrogés disent se sentir vraiment engagés dans leur entreprise (prêts à en faire un peu plus si nécessaire), 38% se disent totalement désengagés et le reste entre les deux.
- un haut niveau d'engagement des employés est directement lié à l'amélioration des profits (étonnant non?)
Il explique ce succès d'une manière simple : il ne s'agit pas d'être le plus gros mais le plus profitable et pour cela il faut dorénavant être capable de se différencier au maximum. Ce qui veut dire qu'il faut être en mesure d'innover en permanence et qu'est-ce qui permet cela? Réponse : le fait que l'organisation mette ses employés en position de le faire, qu'elle leur donne les outils pour cela, qu'elle crée les conditions nécessaires à son émergence. Comme le dit Hamel :
Si l'engagement a pu être optionnel auparavant, il est totalement indispensable aujourd'hui et les conditions permettant de le mettre en oeuvre sont de la responsabilité des managers et là encore les résultats de l'étude sont dérangeants :"...in a world where customers wake up every morning asking, “what’s new, what’s different and what’s amazing?” success depends on a company’s ability to unleash the initiative, imagination and passion of employees at all levels—and this can only happen if all those folks are connected heart and soul with their work, their company and its mission."
- seuls 38% des employés estiment que le haut management est réellement intéressé par le bien-être des employés
- moins de 4 sur 10 pensent que les cadres supérieurs communiquent ouvertement et honnêtement
- moins de la moitié d'entre eux pensent que les décisions du top management sont conformes avec les valeurs qu'ils pensent être celles de l'entreprise
Enfonçons le clou : dans la conclusion du chapitre 2 de mon livre (Les travailleurs du savoir au quotidien - p. 80), je cite une enquête consacrée à la créativité des travailleurs du savoir américains. 88% de ceux qui ont été interrogés se pensent créatifs mais seuls 63% considèrent qu'ils mettent ce potentiel au service de leur entreprise, entreprises qu'ils sont 39% à ne pas considérer comme des entités créatives...
J'en viens maintenant au second article. Il s'agit d'un billet publié par Olivier Piazza sur son blog Seflway. On y apprend que Google vient de lancer son Ecole du développement personnel destinée à ses employé autour de 4 thèmes :
- développement mental
- développement émotionnel
- bien-être et santé holistique
- au-dela de l'ego.
Est-ce que de bonnes conditions de travail nuisent à la productivité? Apparemment pas comme l'actualité débordante de cette société et la puissance (un peu effrayante) qu'elle acquiert jour après jour nous le montre. En fait c'est l'inverse.
Toutes les entreprises doivent-elles former leur personnel à l'instar de Google? Et pourquoi pas!
Bien sûr le chemin est long avant de convaincre des décideurs d'envoyer leurs employés faire des stages de santé holistique ou de méditation mais c'est en fait tout un système qui est à repenser. Google n'a pas un budget formation au sens ou nous l'entendons, celui-ci est "caché" derrière une offre globale qui crée de fait un "style de vie" que ses employés adopteront en souscrivant aux activités proposées. Ils feront leur choix en fonction de leurs besoins de formation, qu'il s'agisse d'améliorer leurs compétences professionnelles ou émotionnelles, un peu comme lorsqu'on s'inscrit à une association multi-activités (j'en viens d'ailleurs à me demander si les universités du 3ème âge ne seraient pas un des modèles à suivre :-). Doit-on parler d'une forme de néo-paternalisme? Sans doute, mais ce que l'on reproche au paternalisme n'a généralement rien à voir avec la non-productivité ou la non-créativité.,
Une fois que l'on est embauché Google ne fait donc plus la différence entre les deux types de formation (professionnelle et personnelle) car ils concourrent à améliorer la performance et donc les profits de l'organisation.
Ce qu'il faut comprendre ici c'est qu'il ne s'agit pas de saupoudrer quelques formations durant l'année mais de changer la vision que l'on a du travail, c'est d'un changement de culture dont il s'agit, changement dont Google ou Apple sont les précurseurs et qui s'ancrera dans les pratiques des dirigeants d'entreprise et des actionnaires lorsqu'ils prendront conscience des profits qu'ils permettent de générer.
Lorsqu'on aura compris que le bien-être des employés au travail, lié notamment à la possibilité d'apprendre tout au long de la vie, est un réel levier de performance permettant la différenciation par rapport à la concurrence alors un grand pas aura été fait. Entre temps on se contentera de regarder ceux qui ont franchi le pas en poussant des OH! et des AH!
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